Mémoire de l'eau
L’artiste peintre Leila Cherkaoui a exposé dernièrement à Dar Tazi dans le cadre de la 23ème édition du Festival de Fès des Musiques Sacrées du Monde sous le signe « mémoire de l’eau»:
Entendue comme source de vie et d’inspiration irriguant tour à tour le corps et l’âme. Le vernissage de cette exposition initiée par l’Association Fès Saiss et la Fondation Esprit de Fès a été rehaussé par la présence effective de plusieurs personnalités officielles et acteurs culturels en l’occurrence l'ambassadeur d'Argentine au Maroc, Mme Maria Fernanda Canas. Habité par un souci constant d’éclairer le patrimoine immatériel de l’humanité, cet événement nous ramène puissamment aux valeurs humanistes : liberté, tolérance, indépendance, ouverture et curiosité. C’est le témoin actif d’un foisonnement humain et artistique.
Née à Casablanca, l’artiste peintre Leila Cherkaoui travaille acharnement à son espace « Atelier de Création », en menant un travail passionnant de recherche sur la vie des formes et la profondeur de la couleur. Les arcades, les ruelles, les silhouettes des êtres humains révèlent la force tranquille de l’artiste et portent un regard intérieur sur nos racines et nos sources d’appartenance. Son langage expressif est riche en termes de recherche et de créativité. Le vocabulaire plastique se décompose en tâches chromatiques et figures ouvertes qui, par leur effet de perspective, multiplient les effets de profondeur...Elle compte à son actif de multiples expositions collectives et individuelles au Maroc et à l’étranger ponctuant une démarche et un parcours d'une grande richesse. Son cheminement artistique singulier ne la met dans le sillage de personne sinon de son propre monde intérieur et de son existence. E
Sur l’acte plastique de Leila Cherkaoui , Nicole de Pontcharra, critique d’art, a écrit dans un article intitulé « révélation » :« Cette peinture de l’intime rayonne de l’engagement de celle qui la délivre, frappant de son sceau une méditation communicable. On ne peut être spectateur, une adhésion s’impose. Une promesse se délivre, si l’on pénètre dans les arcanes de la recherche. Du blanc, des signes en transparence comme des pierres – semble-t-il – fichées en terre, émerge le principe de vie comme le principe de mort. Sortons de l’accès à lumière, à la révélation et regardons les approches démultipliées vers le jardin d’Eden, les mises en espace des fragments de rectangles et de courbes, de l’ordonnancement du désordre. Des fentes dans l’obscur laissent filtrer la clarté, les fragments de cercles s’ajoutent les uns aux autres dans une géométrie inventive, allusive toujours. On cligne des yeux en regardant la pureté en face, elle se donne de biais dans ces peintures si bien architecturées et dans une mobilité permanente. Comme dans le souvenir où tout devient énigme. ». Et d’ajouter : « L’aventure entamée par Leila est dépouillée de toute tricherie, elle n’est qu’exigence de soi et de son art. L’abstraction entretient un dialogue avec le monde formel comme l’inspiration avec la mémoire et un temps qui s’accomplit en puisant dans le passé, le présent et le futur. Une forme nouvelle surgit de cette cohésion sans cesse en mouvement. Leila Cherkaoui aborde le monde des formes dans son extrême mobilité, conduite par son intuition, et surtout une nécessité intérieure.
L'artiste Leila Cherkaoui avec l'ambassadeur d'Argentine au Maroc, Mme Maria Fernanda Canas
De son coté, Maurice Arama (historien d’art, Paris) a écrit : « « La peinture n'est que peinture et rien de plus. Rien de moins, non plus » disait Manet ; à quoi Alechinsky, un demi siècle plus tard, avait ajouté : la peinture « une manière de voir le monde qui peut se lire en tous sens ». Entre deux esprits éminents de l’art de notre siècle, Leila Cherkaoui, par-dessus les crevasses, les failles, les lézardes, les craquelures, les creux et les bosses lance depuis une décennie déjà, ses ponts fraternels.
A l’immédiat, au palpable, à l’ordinaire, son art s’ouvre vers l’éphémère et taraude l’indicible. Ses surfaces sont maculées, rayées, des émulsions y entrent, des matières composites s’invitent, son langage est inédit, son discours force le tumulte, offre des pauses inattendues, des silences apaisants, des aires de recueillement, des niches de gris, des ocres, des bruns, des bleus profonds, des couleurs que notre quotidien nous s’impose sur les murs de nos villes, nos trottoirs et nos portes.
Mais cette « poétique des ruines » reconnaît l’aurore du premier jour. Elle élude les thèmes récurrents, fait volte face devant le nu, le visage, l’objet et le paysage ; Leila Cherkaoui pense ses chromatismes, contourne les redites, se joue des distorsions des formes et sa fréquentation de la matière, les hautes pâtes qu’elle travaille amoureusement, qu’elle pétrit comme une chair vivante rejoignent des terres inédites ouvertes à la contemplation. ».
Pour illustrer autrement l’esprit de cette exposition, Leila Chekraoui a élaboré ce paratexte poétique :
L'océan intérieur
L'océan intérieur
Sur le long du corps vague
Les pics les flots
Au fil du vent
Caressent la case de la liberté.
Cachés au fond du livre
Sur cette page abstraite
Clé et cadenas
Dessinent sur la porte
Les formes bouillonnantes
Prêtes à s'envoler
Prêtes à partir
Vers la spirale lumineuse
D'un rêve sans fin.
Elle occupe en cela une place originale dans la constellation des arts plastiques au Maroc.
Hassan Nour
Leila Cherkaoui expose au Centre d'expositions de Beyrouth
L’artiste plasticienne Leila Cherkaoui (vit et travaille à Casablanca) figure parmi les artistes peintres d’ici et d’ailleurs qui ont été sélectionnés dans le cadre du projet citoyen et créatif « Syri-Arts exhibition and charity auction » dont 101 œuvres d'art sont exposées au Centre d'expositions de Beyrouth, et ce au profit des enfants réfugiés syriens au Liban, premières victimes de la guerre en Syrie.
Organisée par Dr. Kathy Battista, directeur de l’Institut d'Art Contemporain de NY Sotheby, cette exposition a été marquée par une vente aux enchères en bonne et due forme, en faisant connaitre des œuvres représentatives d’un parterre distingué d’artistes de plusieurs horizons tels que Farid Belkahia, Mahi Binebine, Najia Mehadji, Safaa Erruas, Mounir Fatmi, Dia Batal, Said Baalbaki, André Chami, Chaouki, Chamoun, Hammoud Chantout, Amine El Bacha, Rim El Jundi, Walid El Masri, Marwan Kassab, Ali Ferzat, et bien d’autres encore.
Sur son acte pictural, Maurice Arama (historien d’art, Paris), a écrit : « C’est le travail d’une artiste, âme libre, qui ne s’arc-boute pas sur des principes. Elle sait comment le vrai enlace les fidélités picturales, conduit la forme vers l'harmonie tonale, ouvre aux masses l'équilibre des dialogues intimes, porte vers son élan unitaire la composition que la maîtrise gestuelle de l’artiste écarte des étiquettes de la mode. ». Et d’ajouter : « La peinture n'est que peinture et rien de plus. Rien de moins, non plus » disait Manet ; à quoi Alechinsky, un demi siècle plus tard, avait ajouté : la peinture « une manière de voir le monde qui peut se lire en tous sens ». Entre deux esprits éminents de l’art de notre siècle, Leila Cherkaoui, par-dessus les crevasses, les failles, les lézardes, les craquelures, les creux et les bosses lance depuis une décennie déjà, ses ponts fraternels. ».
De son coté, Kenza Alaoui, journaliste, a confié sur son parcours artistique : « Leïla Cherkaoui s'est initiée à l'art dès son jeune âge. Une passion qui fera d'elle l'une des valeurs sûres de l'art plastique marocain. Artiste autodidacte, elle consacre son œuvre à la recherche d'une esthétique qui lui soit propre et sort des sentiers battus. Mais avant, il fallait qu'elle s'essaie à quelques courants. S'inscrivant entre l'expressionnisme et l'abstraction, l'approche plastique de Leïla Cherkaoui vise à explorer la vie des formes et la profondeur des couleurs en intégrant des figures architecturales.
Forte d'une sensibilité artistique au-delà de tout soupçon, elle aiguise son talent par un travail profond sur la lumière. Une quête qui se transforme en véritable obsession. Au fil du temps, elle enchaîne les manifestations artistiques et multiplie les expositions dans les différentes villes du royaume. Loin d'être un simple acte créatif, la peinture est pour Leila Cherkaoui, un moyen privilégié d'expression. La voix par laquelle elle dit l'indicible. ».
Par Ahmed Tarek (critique d’art)
Droit à la mémoire
A titre de consécration, l’artiste marocaine Leila Cherkaoui a été sélectionnée récemment parmi les artistes contemporains participants à la cinquième édition de la Biennale d’Art de
A titre de consécration, l’artiste marocaine Leila Cherkaoui a été sélectionnée récemment parmi les artistes contemporains participants à la cinquième édition de la Biennale d’Art de Saint-Germain en-Laye au Manège royal, et ce aux cotés de 89 artistes saint-germanois, yvelinois et de toute la France y compris des lauréats des éditions précédentes . Cette année, cette biennale a accueilli deux artistes russes, membres de l’Académie des Beaux-arts de Russie, proposés par le président d’honneur du jury Amri Aminov, lui-même nouvel académicien et d’origine franco-tadjik. Il a pris une nouvelle fois une dimension internationale, en accueillant également les œuvres de deux artistes de Winchester, ville américaine, jumelée avec Saint-Germain-en-Laye. Cette cinquième biennale d’art a rendu également hommage au grand artiste Saint-Germanois Ladislas Kijno, décédé en novembre 2012. Rendez-vous incontournable et attendu, dite biennale a été marquée cette année par l’exposition exclusive des œuvres d’art de l’artiste marocaine Leila Cherkaoui (peinture, sculpture et installation). Elle a permis aux visiteurs de découvrir ses œuvres expressionnistes qui vacillent entre la nouvelle figuration et l’abstraction : œuvres dédiées à la mémoire du lieu qui permet à notre existence, à la fois matérielle et symbolique, de se forger une identité propre.
A des titres variés, chaque lieu est doté d’une mémoire tatouée qui se présente comme totalité symbolique vivante marquant le destin d’un être et d’un territoire. Dans ses œuvres qui manipulent la peinture, la sculpture et l’installation, l’artiste essaie à sa manière de remettre en question le caractère plastique de cette mémoire, en mettant en relief son imaginaire collectif et ses traces signifiantes. Ainsi, ses œuvres fascinées par la lumière et les couleurs deviennent un acte de réminiscence et un pacte de reconnaissance à l’égard de nos temps perdus. Cette mémoire visuelle collective invite, donc, à explorer le sillon de notre intériorité et de notre sensibilité pour conférer à nos ressources expressives forme et contenu.
A travers un parcours d’une grande richesse ponctué d’expositions individuelles et collectives au Maroc et à l’étranger, loin des fioritures et des apparences, Leila Cherkaoui s’impose en tant qu’artiste plasticienne majeure dont l’œuvre est appelée à durer dans le lieu et dans le temps.
L’artiste selon le regard de Maurice Arama, historien d’art de renom, « sait dans sa poétique des ruines comment le vrai enlace les fidélités picturales, conduit la forme vers l'harmonie tonale, ouvre aux masses l'équilibre des dialogues intimes, porte vers son élan unitaire la composition que la maîtrise gestuelle de l’artiste écarte des étiquettes de la mode ». Cette peinture, ajoute Maurice Arama, est encore « une prise de conscience qu’agencent la force du travail et l’authenticité de l’inspiration ». Il poursuit, lui-même inspiré par le travail puissant de l’artiste : « Des forces s’unissent à des particules de lumière et irradient chaque œuvre de manière contrôlée. Ici, les espaces s’enlacent au temps. Les gestes venus de la grammaire visuelle de l’artiste, les tours, voûtes, fortins, murs et éminences prétentieuses que l’histoire universelle arase, retrouvent la berge du fleuve le long duquel l'homme est invité à sonder sa capacité de toujours détruire l’œuvre de ses mains. Sans être une narration abstraite, cette peinture retient les flux tendus dans lesquels nous semblons englués ».
Hassan Nour
من منظور المؤرخ و الناقد الجمالي موريس أراما
ليلى الشرقاوي أو "شعرية خرائب" الفجر الأول
تنظم مؤسسة مجموعة القرض الفلاحي بالمغرب للفنون و التراث القروي معرضا فرديا للفنانة التشكيلية ليلى الشرقاوي (تصوير صباغي ، منحوتات ، تنصيبات ، ألواح بارزة) ، و ذلك إلى غاية 20 أكتوبر الجاري برواق أبو عنان بالرباط. حول تجربتها التشكيلية ، كتب المؤرخ و الناقد موريس أراما (مقيم بباريس) نصا جماليا باللغة الفرنسية في ما يلي ترجمته باللغة العربية:
" ليلى الشرقاوي تترصد، و تلاحظ، و تمنحنا رؤية العالم الذي تكتشفه. فهي تحلم بالأشكال و تؤول الدرجات اللونية. هذا العالم، عالمنا الممزق و السديمي، محمول بفن يقظ و أصيل يجمع بين الصدمات الجمالية و التأمل التشكيلي.
إنه عمل فنانة، روح حرة، لا تستند إلى مبادئ. فهي تعرف كيف يحبك الحقيقي الإخلاصات التصويرية، و يقود الشكل نحو الانسجام النغمي، و يفتح للكتلات توازن الحوارات الحميمية، و يحمل نحو مداه الموحد التركيبة التي تنزاح عن لصيقات الموضة.
تزعزع كل لوحة الصورة في شكل بحث عن الحركة القديمة أو الدائمة، و كل معركة تقارب الذروات، و كل التزام يدغدغ نقط القطيعة، و كل ملحمة توارب، و تراوح، و ترجح، و تطفو قبل دخولها في العراك و النشوة الحميمية للرغبة.
الأجدر أن نتحدث عن الحب أمام أعمال ليلى الشرقاوي. فالفنانة تضع، بين الألم و الغضب و بين الأسى و الرفض، رسائل غارقة في النضج، و شظايا نور تتخلى عنها كأن بها حظوات رطبة، و بياضات مشرقة تبيد أسرارها، و متع هاربة، و أنفاس نجومية، و اعترافات مفصوح عنها على طرف الريشة، و تجليات، حيث تقابل العين اليقظة مداعبة بصمة و هجر أصبع.
يعيد هذا الإبداع التصويري إنتاج الحياة. في هذا الغليان، يتواصل إبداع جديد. الفاجعة التي يتشرب منها واقعنا اليومي كلية الحضور، و الحقد مقيد بالنسيان، و الدم بالجريمة، و كثير من النوائب المعروضة تبعث اليأس حد الدموع.إذن، أمام هذه الآلام الجماعية، تبسط ليلى الشرقاوي لوحاتها كعدد من المرايا التي تحيلنا على آلامنا و عدم اكتمال رغباتنا. لوحات عبارة عن صنادبق رنانة من أجل صرخة امرأة، و أم، و سائر الأمهات.
إن هذا التصوير الصباغي، أيضا، عملية وعي تنظمها قوة العمل و أصالة الإلهام. تتوحد القوى مع ذرات النور، و توهج كل عمل بصيغة مراقبة. هنا، تتشابك الفضاءات مع الزمن، تأتي الحركات من النحو البصري للفنانة، الأبراج، و القبب، و القلاع الصغيرة، و الجدارات، و الروابي المتباهية التي مسحها التاريخ الكوني تلقى من جديد ضفة النهر، حيث الإنسان مدعو على مداه لاستطلاع قدرته على التدمير الدائم لصنيع يديه. بدون أن يكون سردا تجريديا، يحتفظ هذا التصوير الصباغي بالتدفقات الممدودة التي نبدو فيها لزجين.
"التصوير الصباغي ليس إلا تصويرا صباغيا لا غير. لا أقل و لا أكثر" قال مانيه. و أضاف ألشينسكي، نصف قرن بعد ذلك :" التصوير الصباغي طريقة لرؤية العالم التي يمكن قراءتها في كل المعاني". بين هذين الفكرين اللامعين لفن قرننا، تضع ليلى الشرقاوي منذ ألفية خلت جسورها الأخوية من أعلى الشقوق، و الانكسارات، و الصدوع، و التشققات، و التجاويف، و الحدبات.
على التو، و بالملموس، و عادة، ينفتح فنها نحو العابر و ينخر ما يفوق الوصف. سطوحها مبقعة، و مخدشة، حيث تلج مستحلبات التصوير الضوئي، و يتم استدعاء مواد تركيبية. لغتها فريدة من نوعها، و خطابها يفرض الجلبة، و يمنح وقفات غير منتظرة، و لحظات صمت مهدئة، و مساحات للتأمل، و فجوات من اللون الرمادي، و مغرات، و ألوان سمراء، و ألوان زرقاء عميقة، و ألوان يفرضها الواقع اليومي على جدارات مدننا، و أرصفتنا، و أبوابنا.
لكن "شعرية الخرائب" تتعرف على الفجر الأول. تتهرب من المواضيع المتداولة، و تعكس الاتجاه أمام العراء، و الوجه، و الشيء، و المنظر. تفكر ليلى الشرقاوي في تركيباتها اللونية، و ترسم محيط الأقوال المستعادة، و تلعب بالتواءات الأشكال، و مخالطتها للمادة. كلالعجائن العليا التي تشغلها بحب و تدعكها كلحم حي تلتحق بالأراضي الفريدة المنفتحة على التأمل".
ترجمة : د .عبد الله الشيخ