Un pan de notre culture picturale qui s'en va.
Une figure représentative de l’art marocain contemporain de renommée internationale, vient de décéder au Maroc suite d’une grave maladie : Sadya Bairou qui a été inhumée à Essaouira mardi dernier, en présence d’un grand nombre d’artistes et acteurs culturels. En cette douloureuse circonstance, nous présentons nos condoléances attristées au mari de la défunte, à tous ses frères et sœurs de la défunte ainsi que tous ses amis artistes et intellectuels. Son patrimoine symbolique signifiait un égard à la production de l'esprit et la reconnaissance d’une artiste de portée universelle qui, dans le respect de la diversité des cultures, préservait son originalité et son identité par le déploiement
Nom incontournable de la nouvelle figuration et de l’abstraction, la défunte a su élaborer un style personnalisé marqué par la profondeur et la quête identitaire conditionnée par l’identité universelle et un retour aux sources. Hypersensible, elle gère tout un espace pictural qui met en relief une nostalgie qui reflète le regard profond du Maroc pluriel via le mouvement et la vie des couleurs.
La peinture de Sadya Bairou est un carrefour qui nous ouvre un musée imaginaire et une voix du silence. C’est l'occasion de traduire l'émotion ressentie par les passionnés des arts plastiques après la disparition de l'un de ses membres les plus représentatifs de la peinture marocaine. C'est aussi un témoignage à la mémoire de cette artiste avec laquelle nous avions partagé tant d'espaces artistiques où la création était l’univers d'expression commune.
Artiste de renommée nationale et internationale, ambassadrice de la peinture marocaine durant toute sa vie artistique, Sadya est bénéficiaire d'une haute distinction culturelle nationale ne peut que faire l'objet d'égards à titre posthume. Elle est un élément de l’expression, de notre histoire culturelle qui a permis l'émergence de valeurs emblématiques dont le rayonnement a dépassé l'enceinte nationale pour imposer une forme picturale au delà des frontières, au delà des océans. Sa certitude était son nomadisme bâti sur le dialogue, la défense des droits de l'homme, la lutte contre l'exclusion, contre l'injustice, l'engagement pour un monde meilleur.
Sadya a travaillé sur l'univers de la beauté apparente, de l'esprit et de l'art, par un chemin enrichi d'une expérience picturale singulière continuellement remise en cause et des écrits puisés dans une réflexion évolutive.
Peintre de l’expressionisme abstrait, elle a contribué activement à la promotion de la création au féminin qui cherche à s'affirmer et à accomplir le rôle qui incombe à la femme artiste dans la société. De surcroît, elle n'a pas cessé, durant sa vie, de militer en s'impliquant corps et âme dans des actions citoyennes. L'artiste a rendu l'âme. Mais ses toiles auxquelles elle a savamment mêlé poèmes et magie chromatique ainsi que ses carnets de voyage et ses écrits poétiques témoigneront à jamais de son incontestable talent.
Née à Essaouira, Sadya a effectué des études à l'Ecole des Beaux Arts de Mulhouse et à l'Ecole des beaux arts de Tétouan. Elle a fait des recherches approfondies sur le patrimoine visuel arabo-berbère et sur l'imagerie symbolique universelle mystique.
Depuis son jeune âge, Sadya a vécu dans un va et vient entre les cultures, elle a fait de longs voyages et résidences en France, en Italie Allemagne et en chine. Depuis 1994, elle a vécu entre Berlin et Essaouira. L'artiste s'engage dans l'art comme dans la vie, et elle est préoccupée par les questions socioculturelles contemporaines. En 2004, elle a fondé l'Association Akal de l'Art et l'Ecologie. En 2005 elle a initié la caravane des arts et de l'environnement: un événement international, qui a pour objectifs l'éducation au respect de l'environnement et de la diversité par le biais de la pratique artistique.
Le travail de l’artiste a été largement exposé dans plusieurs manifestations au Maroc et a l’étranger.