Lettre et signe
La Galerie des expositions de la Fondation de la Mosquée Hassan II de Casablanca abrite jusqu'au 27 mars la première rencontre Nationale d'Arts Plastiques
regroupant une pléiade d'artiste plasticiens qui travaillent sur les signes et les lettres, en l'occurrence Omar Afous, Malika Aghzenay, Aissa Ikken, Rim Laabi, Abderrahman Banana, Aicha Aherdane, Abdellah El Hariri, Ahmed Benismael, Musytapha Boujmaoui, Mohammed Nabili, Nourdine Fathy, Abderrahman Ouardane, Wafaa Mezouar, Said Raji, Houcine Miloudi, Aziz Sayed, Al Mostapha Miftah, Moubarak Ammane, Hassane Moukdad, Mohammed Moussik, Najat Moufid, Hakim Ferass, Asaid Reghay, Amal Bachir, Mohammed Zouzaf, Khalid Bayi, Hassane Mimouni, Ghita Assalih, Houssein Skhoun, Amzil Mohamed, Abdelaziz Ousalah.
L'errance de ces artistes à travers les signes demeure le moteur principal qui entraîne leurs alphabets iconographiques dans des univers différents et leur permet ainsi de vivre de nombreuses expériences humaines. Ainsi, le signe est traité non seulement comme unité de communication, mais aussi comme élément de signification. C’est cette mutation dans la théorie qui a permis de découvrir l’infinité des lieux ouverts à l’activité du signe et en particulier le patrimoine, par quoi les artistes ont tenté de définir une identité collective. Les formes qu’ils interprètent relèvent plus d’une symbolique que d’une sémiotique.
Pour Abdellah El Harriri, concepteur de cette exposition, la démarche plastique des artistes exposants relève de la liberté gestuelle loin de tout usage ornemental des motifs calligraphiques et architecturaux. Il s’agit d’une scénographie chromatique qui crée une festivité de couleurs et de formes variées et débordantes. Les artistes gèrent sciemment l'espace de la toile et la soumet à une tension permanente, celle qui anime leur vision artistique et le maintient dans un équilibre problématique. Ici, les artistes créent un nouveau langage visuel, dynamique et tendu vers l’inconnu. Tous ces artistes ont l'art d'instrumentaliser les lettres et les signes pour en faire un langage sacré qui plonge dans une sphère de spiritualité magique et imprime des émotions indicibles.
Sur cette exposition thématique, première dans son genre au Maroc, Bouchaib Fokar, le conservateur de la Fondation de la Mosquée Hassan II de Casablanca a écrit:"Le "dit" n'est pas systématiquement utile par nécessité, surtout quand il s'agit de traquer les nobles sentiments humains, de scruter les profondeurs de la création et de graver sur le fabuleux imaginaire.
Je reconnais qu'au commencement était "le verbe" et je reconnais également que le verbe est, et sera pour toujours, car il est l'expression des"noms"que Dieu a inculqués aux Hommes le jour de leur genèse et de leur création. Toutefois, la lettre la lettre demeure le principal élément de la structure du verbe et sa quintessence? Quant au signe, il est un signal intrinsèquement générateur de la communication positive… Il est temps de puiser sur le signe surtout à notre ère dotée d'impressions, d'impulsions et de contraintes psychologiques voire de contradictions, comme alternative de tout discours banal, qui accentue l'enfermement, étouffe les canaux de la communication et accumule nos complexes d'ordre psychique. ". Et d'ajouter:"Nous avons besoin - la plupart du temps en tant que récepteurs dont les cœurs sont brisés par le mensonge - d'entendre avec nos yeux, au lieu de nos oreilles, et de lire en silence à travers nos sentiments et nos affections, au lieu de nos bouches et nos lèvres.
En initiant la première édition de l'exposition nationale "lettres et signes" regroupant une pléiade d'artistes provenant de toutes les régions du Maroc, la Fondation de la Mosquée Hassan II à Casablanca est convaincue de la nécessité de la quête des valeurs expressives diversifiées, loin de tout tapage et spéculation, et ce pour permettre au récepteur de communiquer, harmonieusement, avec sa nature profonde et de saisir dans la sérénité les traits saillants de son entourage riche de plusieurs significations, en l'occurrence la lettre et le signe.
La galerie des expositions de la Médiatique de la Fondation abrite, donc, cette rencontre artistique dont je suis persuadé que tous les exposants qui ont approché la thématique "lettres et signes" ont proclamé par leurs créations des cantiques et des hymnes mystiques profonds, exploitant la diversité des outils et des couleurs. Tous ces éléments structurants ont abouté à un hymne lyrique et monophonique, proclamé dans cet espace spirituel merveilleux par une voix angélique mais combien silencieuse, et par des sentiments nobles. ".
Selon la perception visuelle de Aissa Ikken , le signe est une véritable aventure. Une aventure née du passé et qui s’est projetée dans l’avenir. A partir de l’interrogation sus ces signes, ces formes visuellement perceptibles dans notre environnement, il s’est produit, dans l'approche artistique, une évolution vers d’autres formes qui ont dépassé leur contexte identitaire pour d’autres sphères. Le signe a immigré vers d’autres contrées, suggérant ainsi son universalisme et son ouverture sur d’autres cultures. Sur le plan structurel, il a évolué d’une micro dimension à une expressivité autonome puis à des formes humaines. Certes, schématisées, mais exprimant des situations plus abordables sur le plan de la compréhension.
Cet artiste chercheur a l’impression, de remonter le temps, de découvrir par régression, comment l’être humain a travers sa vision de la vie, a pu définir des symboles, des signes qui lui avaient permis de communiquer avec les autres.
Les signes surgis de la nuit des temps, ont évolué, se sont métamorphosés, créent parfois, non seulement une dimension esthétique, mais suggérant même un langage poétique de contes, de légendes.