Le « festival de l’étrange » à Essaouira

Abdallah Cheikh : « le  jury est aussi étrange que le festival… »
Lorsque –à Essaouira- dans l’espace de « L’Alliance Franco-Marocaine » on qualifie d’agressif quelqu’un qui se prononce contre « une injustice » (ou l’ arrogance que meuble l’ignorance), c’est que dit-on- il y’a un os !.. L’esprit de l’ère nouvelle , conjuguée à la symbolique touche française, attendue comme autre apport et rappelant l’essence événementielle de l’histoire de la Bastille, pour défendre les valeurs de « la liberté, l’égalité et la fraternité », se fait alors noyer dans la complaisance de résidents restaurateurs ou experts de l’immobilier , qui se veulent « garants de la culture et de l’art » au Maroc. Où en est-on alors dans cet échange interculturel supposé s’épanouir dans le dialogue et la collaboration entre des acteurs, avec leurs différences culturelles, ethniques ou religieuses..
Le festival de l’étrange dans sa 4ème édition fut un moment où de tel questionnement ne pouvait que surgir durant le suspect moment de la déclaration des prix, faite par un jury « aussi étrange que le festival » comme declarait Abdallah Cheikh, critique d’art, et qui n’hésitait pas à défier pour « ouvrir un débat sur le champs » lorsque le représentant de ce jury présentait comme « sculpture » une peinture de Trifes. C’est de telles questions directes qui ne peuvent laisser aucune marge à une supposée « Direction de l’Alliance » pour répondre –par mail- à une artiste participante que le règlement de ce festival-concours réunissait aussi bien « des artistes confirmés comme des amateurs », car dans la sélection (au nom de l’art) on ne peut pas se baser sur « l’amateurisme » dans le jugement et –scientifiquement parlant- on a pas droit de qualifier d’un nom précis ce qui ne l’est pas en fait.
Rachid Afilal, un autre artiste présent lors de cette « soirée fête » (et qui a voyagé comme d’autres , Marocains et Français, pour venir y assister), lançait au même moment que cet espace institution « se transforme subitement en une boutique » lorsqu’il entend le représentant du jury (et plutôt un célèbre ancien joueur de rugby) déclarer que le 3ème prix de peinture était annulé, soulignant ainsi que « les organisateurs eux-mêmes ne respectaient pas le règlement qu’ils avaient annoncé » et pour lequel ils réclament respect « après l’avoir lu ». C’est dans ce sens que divers participants(artistes confirmés ou amateurs, Marocains, Français, ou Italiens ,hommes et femmes) s’entendaient tous sur le fait que « les organisateurs devaient sélectionner au début en tenant compte du qualitatif » dès la réception des participations, pour ne pas justifier l’improvisation à cause de la quantité, « transformant ainsi l’espace de l’Alliance en un bazar », où comme disait la Directrice –tranquillement- dans son discours d’ouverture ils étaient obligés accrocher les œuvres « jusqu’aux toilettes » !?..
C’est ainsi que Mostapha Ennahhal (écrivain, chercheur et journaliste) faisait constater que cet «accrochage se poursuit jusqu’au plafond » de tableaux et de sculptures -que séparent parfois deux centimètres-, et ne dissimule pas son choc de voir de la part des organisateurs  « ni accueil des artistes, ni cocktail, ni catalogue, ni climatisation », pour une foule de présence, comme pour un « souci de statistiques ou d’impact politique ». Il ajouta aussi à quel point il trouvait cette présentation absurde par rapport « à l’organisation habituée par les CCF et les espaces de l’Alliance à travers le Maroc, bien distinguée de cette ambiance, bâclée à la dernière minute ..».
Pourquoi les organisateurs n’ont pas sélectionné avant d’encombrer  le travail du jury, est-ce que dans le jury il y’a les compétences que ne lui reconnaissent pas les observateurs et les participants avisés, est-ce qu’il y’a beaucoup  -ou très peu- d’œuvres « étranges » dans cette exposition, est-ce que –pour les organisateurs- une simple expression de type abstraite ou purement réaliste est « étrange », est-ce que ce festival (depuis sa première édition distinguée) se développe dans le sens de ses objectifs universels d’échange ou bien commence-t-il à s’enfermer dans une vision de présence locale (sous le « soleil d’Essaouira »), est-c que les organisateurs sont réellement à l’écoute des associatifs locaux, des participants, des acteurs  et des partenaires (tel la Province, la Culture,  l’Association Essaouira Mogador,..) ou bien ils ne s’accrochent qu’à l’impact de présence et à « l’image identitaire », en faisant couvrir par un accord et appui supposé,  est-ce que « l’Alliance Franco-Marocaine » à Essaouira est une réelle conjugaison d’échange et de travail entre Français et Marocains et est-ce que le « quota » (non spécialement de nationalité mais plutôt de mentalité) est réellement pris en compte dans la structuration de ce processus,..  tel  sont les diverses questions qui émergent de part et d’autres parmi les milieux observateurs souiris, Marocains ou résidents étrangers.
Dans le sens de cette logique, Dominique Gérard (un artiste Français et autre fou d’Essaouira) qui refuse de participer à ce « festival de l’étrange » , se demande « s’il y’a réellement un rapprochement entre Marocains et Français au sein de cette Alliance, vu que la populaire population souirie ne va pas vraiment voir ces programmes », et d’ajouter que « 150 œuvres risquent ici de ne correspondre à rien, à aucune cohérence »  et que « ces organisateurs qui ne font qu’exprimer leur souci d’être simplement en tête d’affiche, que veulent-ils, et quel est le message qu’ils veulent vraiment transmettre.. ? ». Cela dit, cet artiste ne va pas jusqu'à exclure toute utilité aux actions menés localement, ne serait-ce dit-ils que « pour des initiés qui viennent de temps à autre voir de vraies expositions ou des documentaires ». Certes, on ne peut pas nier les autres efforts qui se font dans cet espace, particulièrement les cours de renforcement, les livres, des musiciens invités d’ailleurs.., mais aussi l’effort continuel de techniciens de l’animation et de la coordination, sans oublier l’initiateur même de ce concept de l’ « Etrange », le sympathique ancien directeur -Alain Billy-, que tous les souiris retrouvent avec grand enchantement. Mais cela, mérite un approfondissement et amélioration des acquis –dit-on-, et aussi selon certains (du fond de l’Alliance même), une étude continuelle de ce qui se propose comme activités, pour ne pas couvrir de simples propositions individuelles ou des « projets dictés ou parachutés », et pour ne pas utiliser le noms d’institutions ou de respectables personnes, simplement « pour adoucir »..
C’est cela qui devrait rappeler les valeurs évoquées ci-haut, particulièrement à des personnes qui ont voulu « presque gifler » Abdallah Cheikh, connaisseur d’origine sourie et venant spécialement de Casablanca (où ils anime des salons d’art de grandes ampleurs), comme un résident Français –membre de l’Alliance à Essaouira- qui l’a suivi jusqu’à la sortie du bâtiment en le grondant pour  s’être exprimé dans cette « fête » dit-il et en lui rappelant que s’il n’était « pas content » il n’avait  qu’à aller faire son festival à lui. Oublie -t-il , ce monsieur, que ce festival est aussi celui de personnes comme Abdallah Cheikh, qui peut actuellement s’exprimer librement même dans un commissariat, que le bâtiment même de « l’Alliance » a été mise à disposition par la ville –avec l’initiation et l’intelligence de grandes personnes souiries- pour l’accueil de tout le monde, particulièrement des Marocains et très particulièrement des souiris, toutes origines confondus, et ceci pour les messages profonds de l’art, de la culture et de l’échange ?.. Et comment, au nom des valeurs nobles comme celle de « la liberté de l’expression », des personnes –souiries ou pas- peuvent-ils formuler et exprimer leur critiques à Dar Souiri ou à la Municipalité, mais pas dans le siège de cette « Alliance » ?!...
Brahim Zahir