Pleurs des anges
Dans le cadre de la première édition du Salon Provincial du Livre organisé par l’Association « Initiative et développement » en collaboration avec les organismes concernés de la ville d’Essaouira, l’Espace Dar Souiri a abrité récemment la présentation et la signature du premier recueil de nouvelles de Hind Labdag « Nahib Al Malaika » ( pleurs des anges), publié en langue arabe aux éditions « Oumnia pour la création et la communication littéraire et artistique», avec le soutien du Ministère de la Culture et du Syndicat des Ecrivains et Chercheurs Marocains.
Accueillie au départ par Mr André Azoulay, conseiller de Sa Majesté et président fondateur de l’Association Essaouira Mogador, Hind Labdag a pu creuser peu à peu son propre sillon dans la paysage littéraire marocain souvent dur d’accès. Dans son intervention, elle a étalé d’une manière savante ses propres conceptions et ses propres visions humanistes, en insistant sur le pluralisme théorique et le fondement ontologique.
Particulièrement sensible, elle gère l'univers de l’écriture avec audace et passion, en évoquant plusieurs concepts et thèmes, à savoir l'écriture, la sagesse, l’espoir, l'unité, l’ouverture, l’énergie spirituelle entres autres.
De son coté, Mostafa Ennahal, critique littéraire, a affirmé que l’acte narratif de Hind Labdag est marqué par le dialogisme, le pluralisme linguistique et l’ouverte sur l’autre au pluriel. Sa démarche littéraire est est inépuisable car elle est en relation directe avec la variété des domaines de l'activité humaine comme disait Bakhtine. Pour définir le caractère général de l'énoncé, il y a nécessité, nous dit Bakhtine de prendre en considération la différence essentielle qui existe entre le genre de discours premier et le genre de discours second. La sphère d'échange est ici d'une grande importance.
Hind se positionne, tour à tour, comme esthète et écrivaine, réunissant ainsi le raisonnement et l'imagination littéraire : c’est l'un des seuils incontournables dans la compréhension de l’esprit des nouvelles. Il s’agit d’un pacte narratif fondé principalement sur la question de l'être en tant que conscience responsable de sa réalité et de son destin. En effet, Hind interroge la condition d’être et de paraître à partir de la mise en scène de la conscientisation comme moteur de la vie.
Fruit d’une grande expérience narrative et d’une passion renouvelée, le recueil « pleurs des anges » comporte quatre nouvelles significatives constituant la trame textuelle et la synthèse de la vie de cette écrivaine talentueuse. La couverture de cette nouvelle production littéraire est illustrée par un tableau merveilleux de Youssef Labdag, une figure incontestée de la nouvelle sensibilité au Maroc.
Dans ses nouvelles, Hind nous invite à percevoir tout un chromatisme musical ou audition colorée. Elle meuble ses univers et leur attribue les profondeurs de la vie, à la recherche d'une langue accessible et accrochante : c’est la langue de « l’aisé inaccessible ».
Ainsi, l’écriture narrative de Hind nous parle de notre réalité pleine et entière, elle renvoie à notre « moi » inscrit dans le monde. Rilke disait « l’écriture est le lieu d’une expérience», c’est finalement l’expérience de notre propre rapport au monde. Ici, le récit est une façon d’être au monde, de le questionner, de s’interroger sur les choses existentielles.
Reste à souligner que Hind, juriste et femme de Lettres et Sciences Humaines, conçoit la narration comme une façon de traverser le monde, l’esprit ouvert, curieux. Lieu de forte implication où l’être se révèle, l’acte d’écriture s’interroge sur la complexité de la vie : « L’écriture relève d'abord d'une réflexion profonde avant tout, d'où l'impérieuse nécessité de réinterpréter le vécu et la mémoire et de s'ouvrir sur l'Autre, comme il est et non comme on souhaite le voir », estime Hind.
Dans sa préface, le critique littéraire Sadouk Nourrreddine, a précisé que l’acte d’écrire est un acte de représentation connotative, à travers une lecture profonde d'une réflexion critique singulière.
Paru en 2010, l’ouvrage, décliné en 214 pages en format moyen, se propose de revenir sur des questions de l’être, son existentialisme et son essence, et ce à partir d’un jeu impressionnant qui vacille entre la réalité et l’imaginaire.
Pour Ali Zamharir, président de l’Association « initiative et développement », cette œuvre, considérée comme premier jet de l’écrivaine, vient enrichir la bibliothèque des nouvelles aux souffles romanesques. Elle a pu assimiler le texte à une toile qui nécessite beaucoup de réflexion afin de cerner ses couleurs et son fond.
« pleurs des anges » : véritable aventure qui examine l'existence humaine dans ce qu'elle a de plus compliqué, en l'occurrence son incompréhensibilité et sa complexité.
A .K